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SE BATTRE JUSQU'AU DERNIER SOUFFLE POUR LA LIBERATION DU KONGO
SE BATTRE  JUSQU'AU DERNIER SOUFFLE POUR LA LIBERATION DU KONGO
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25 avril 2010

Jean-Pierre Bemba, victime d'un procès politique ?

L'affaire Bemba serait-elle une procédure destinée à l'amener à rendre compte des crimes qu'il aurait perpétrés par ses troupes en R.C.A. comme le soutient l'Accusation, à rendre justice pour toutes les victimes des atrocités et violences sexuelles commises en R.C.A., et qui n'arrêtent de crier justice et réparation, ou il s'agit simplement de maintenir M. Bemba en dehors de la scène politique congolaise, pour asseoir le régime de M. Joseph Kabila en fragilisant ou en décapitant son opposition politique ?

De toutes les multiples questions que cette affaire soulève, nous nous limiterons à commenter juste quelques unes, en nous fondant essentiellement sur la décision de la chambre préliminaire du 10 juin 2008 (ICC-01/05-01/ 08), ainsi que sur les questions et répliques soulevées aux audiences de confirmation des charges du 12 au 15 janvier 2009. Une mise au point s'impose sur certaines idées erronées autour de la personne de M. Bemba (1) avant de rappeler que l'affaire Bemba est avant tout l'aboutissement des enquêtes qui viennent de durer plus de quatre ans. Par cette longueur, on est en droit de s'attendre objectivement à un dossier bien ficelé de la part de l'Accusation. Malheureusement, la Défense semble avoir réussi à fragiliser les arguments de l'Accusation tant sur la preuve de l'existence d'un prétendu plan criminel commun (allégation qui reste incompatible avec le recours à la notion du risque développée par le Procureur dans le mandat d'arrêt du 10 juin 2008) (3) que sur la question relative à la responsabilité tant des troupes du M.L.C., que sur celle de la responsabilité personnelle de M. Bemba dans la commission des crimes (4). Mais la grande question reste celle de savoir si finalement M. Bemba n'est pas une victime expiatoire de toutes les atrocités et obscénités ce qui ont eu lieu en R.C.A., sans nécessairement en être le coupable. L'argument d'un procès politique pourrait se confirmer si la chambre préliminaire, tout en ne confirmant pas les charges, maintenait néanmoins M. Bemba en détention pour permettre au Procureur de chercher d'autres preuves à charges. Dans ce cas, en effet, il sera très facile au Procureur de tomber dans le piège de n'instruire qu'à charge et non à décharge comme cela est pourtant exigé ; et le résultat concret sur terrain ne conduira qu'à sa mise à l'écart de la scène politique congolaise, sur la base d'un dossier qui ne répond pas à toutes les questions de fond (5).

Il nous emble important de préciser que nous ne sommes pas militant ni sympathisant du M.L.C. Nous avons simplement estimé que la religion des droits de l'homme doit-être défendue et prêchée sans discrimination aucune fondée sur la race, le sexe et surtout l'appartenance politique des victimes éventuelles. Mais comme dit ci-haut, avant d'aborder ces quelques questions une mise au point s'impose.

I.- M. Bemba est-il un « big fish », (gros poisson) ?

On se rappellera que M. Bemba a souvent été présenté comme un «

big fish » de la C.P.I. Cette

conception n'est pas non plus exacte. M. Bemba est «

On rappellera que lorsque le Procureur de la C.P.I. a notifié son intention d'engager des poursuites contre les auteurs des crimes commis au Nord Ouest de la république centrafricaine, crimes qui sont imputés aux troupes fidèles à l'actuel président M. F. Bozizé, ce dernier a écrit une lettre au Secrétaire général de l'O.N.U., Ban-Ki moon, le 1er août 2008, lui demandant d'intercéder auprès du Procureur afin que celui-ci n'étende pas ses enquêtes aux crimes commis au Nord du pays et qu'en cas d'enquêtes de la C.P.I. sur ces crimes qu'il soit fait recours à l'article 16 du Statut de la C.P.I., qui donne au Conseil de sécurité de l'ONU le pouvoir de suspendre les procédures de la cour pour une durée pouvant aller jusqu'à 12 mois, renouvelables, si cela est nécessaire pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Par ailleurs les faits reprochés à M. Bemba remontent à une époque antérieure à son statut de Vice-Président de la R.C.A., et même à celui de sénateur qu'il avait au moment de son arrestation à Bruxelles. Il avait seulement le statut de Président du M.L.C. dans les territoires congolais sous son contrôle. On ne doit donc pas distraire l'opinion sur les véritables gros poissions en R.C.A.

En deuxième lieu, on se rappellera qu'au moment de son arrestation, M. Bemba se préparait à rentrer en R.D.C. pour y assumer le rôle chef de file de l'opposition, et que d'après les propos de la porte parole dela C.P.I, son retour en R.D.C. allait compliquer son arrestation éventuelle. Cet argument ne tenait évidemment pas debout dès lors qu'à ces jours, tous les détenus de la C.P.I. sont des congolais arrêtés à Kinshasa en R.D.C. Sur ce point la coopération du gouvernement congolais est donc irréprochable et la crainte avancée n'est pas fondée.

II.- L'affaire Bemba : Le résultat des enquêtes qui ont duré plus de quatre ans

Pour rappel c'est depuis le 22 décembre 2004, la R.C.A. déférait la situation à la C.P.I. Deux ans plus tard, face à l'inaction du Procureur, le Gouvernement centrafricain fit un rappel. En suite de ce rappel, le 30 novembre 2006, la chambre préliminaire de la C.P.I., décida de demander au Procureur « d'élaborer un rapport sur l'état d'avancement actuel de l'examen préliminaire de la situation en République centrafricaine, qui lui serait présenté, ainsi qu'au Gouvernement de la République centrafricaine, auplus tard le 15 décembre 2006, avec une estimation de la date à laquelle l'examen préliminaire de la situation en République centrafricaine serait conclu et de la date à laquelle une décision aux termes de l'article 53 §1 du

big fish » en R.D.C. Mais les crimes dont il est question n'ont pas été commis en R.D.C, mais plutôt en R.C.A. Or en R.C.A. M. Bemba n'est nullement pas un « big fish ». L'ancien comme l'actuel président de cette république demeurent en réalité les véritables gros poissons. En effet, les troupes de l'actuel président seraient également impliquées dans des crimes qui ont été commis au Nord-Ouest de la R.C.A. comme nous le verrons.

Statut serait prise ». C'est ainsi que le 15 décembre 2006, le Procureur fera un Rapport dans lequel il fournissait des renseignements plutôt généraux sur l'état d'avancement de l'analyse des informations et des difficultés rencontrées sur terrain pour approfondir l'analyse.

Le 22 mai 2007, le Procureur de la C.P.I. décide finalement d'ouvrir une enquête (Voir le document ICC-OTP-BN-20070522 -220-A_Fr) . Dans cette décision il promit de focaliser son attention sur les crimes commis entre octobre-novembre 2002 et février-mars 2003. Il affirma également continuer à recueillir des informations et de prêter attention aux allégations de crimes commis en RCA notamment au Nord du pays vers fin 2005.

Le 9 mai 2008, le Procureur fera une demande d'un mandat d'arrêt contre M. Bemba, demande fondée sur l'article 58 du Statut de la C.P.I. qui en est normalement la base juridique habituelle. Mais le 21 mai les juges de la chambre préliminaires, demanderont au Procureur des « informations supplémentaires et des pièces justificatives concernant divers aspects de sa requête notamment à l'appui des chefs d'accusation d'autres formes de violence sexuelle et de meurtre, ces deux crimes étant envisagés sous la double qualification de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre » (§ 6 de la décision du10 juin 2008). Mais le Procureur, avant même d'avoir produit ces informations supplémentaires, demandera aux juges l'application de l'article 92 relatif à la délivrance du mandat d'arrêt provisoire au motif que le suspect se préparait à quitter Bruxelles pour aller en RDC où, d'après le Procureur, il serait plus difficile de l'arrêter. C'est ainsi que le 24 mai 2008, M. Jean-Pierre Bemba Gombo, premier (et jusque là le seul) suspect dans cette affaire est arrêté à Bruxelles, en vertu d'un mandat délivré la veille et se fondant aussi bien sur l'article 58 que 92, alors que comme nous l'avions vu, les juges ne disposaient pas encore des informations et preuves supplémentaires qu'ils ont demandées quelques jours plus tôt. Cette précipitation serait peut être à la base de certaines défaillances du dossier de l'Accusation.

III.- Les crimes commis sont-ils le fruit d'un plan criminel commun ou le fruit d'une activité dont la réalisation comportait le « risque » de la commission desdits des crimes ?

Dans la décision du 10 juin 2008 sous examen, on peut constater que les juges de la chambre préliminaire sont revenus plusieurs fois sur la notion du « risque » (voir les paragraphes 72,80 et 82 de la décision précitée). Le recours à la notion du risque semble pourtant inconciliable avec la notion de plan criminel commun développé par le Procureur. Dire que les crimes ont été commis parce que Bemba a accepté les risques, c'est dire que l'on a affaire à des victimes collatérales d'une guerre qui a été menées par des « non-professionnels » c'est-à-dire des éléments indisciplinés. Ce genre d'actes reste étranger au prescrit de l'article 8 du Statut de la C.P.I. En réalité toute guerre comporte des risques de commission des crimes de guerre. La notion même de « guerre propre » n'existe que dans le monde idéel. On doit ici rappeler que l'article 8 du Statut de la C.P.I. vise les crimes de guerre qui « s'inscrivent dans le cadre d'un plan ou une politique ou lorsqu'ils font partie d'une série de crimes analogues commis surune grande échelle ». A coup sûre une telle formulation du chapeau de l'article 8 exclue l'hypothèse

des crimes survenus en raison des risques qu'on aurait acceptés, et exclue également l'hypothèse des victimes collatérales des actes isolés des éléments indisciplinés. Il nous semble ainsi contradictoire d'affirmer en même temps que les crimes commis sont la conséquence des risques assumés par M. Bemba et ses alliés, tout en soutenant l'existence d'un plan criminel commun dont le but était la commission desdits crimes.

IV. La question de la responsabilité .

A.- L'imprécision sur l'imputabilité des crimes commis aux troupes du M.L.C.

Qu'est-ce qui prouve que ce sont les troupes du M.L.C. qui ont commis les crimes et obscénités allégués ? A cette question, on constate que les critères auxquels recourt l'Accusation sont des critères essentiellement linguistiques. Apparemment les assaillants étaient des «

B.- L'imprécision sur le mode de participation de M. Bemba dans la commission des crimes allégués (Art. 25-3-a et 25-3-b du Statut de la C.P.I.).

Cette imprécision découle essentiellement des modes de responsabilité retenue par l'Accusation. En effet, pour beaucoup de gens, M. Bemba est poursuivi en tant que le supérieur hiérarchique qui a négligé de prendre les mesures nécessaires pour prévenir ou réprimer les

lingalaphones ». Ce critère apparaît très flottant dans la mesure où on trouve une partie de la population centrafricaine qui parle aussi le lingala. Mais le plus absurde c'est que les actes criminels semblent avoir été commis par des troupes appelées banyamulenge. Or les Banyamulenge tel que cela est connu sont des peuples qui vivent dans les hauts plateaux de Minembwe dans le Sud Kivu, près de Uvira et ces peuplades sont « rwandophones »et dans une certaine mesure des « swahiliphones ». On constate ainsi que le critère linguistique ne permet pas d'identifier les agresseurs comme étant destroupes du M.L.C. Dire que ce sont des banyamulenge c'est exclure les troupes du MLC dans la commission des atrocités car ceux qui les ont commises sont des « lingalaphones ». On ne peut normalement pas discuter d'une éventuelle responsabilité personnellede M. Bemba si l'on n'a pas préalablement établi que ce sont ses troupes qui sont commis les crimes allégués. Mais même dans l'hypothèse où ce sont ses troupes qui ont commis les crimes, la question de l'établissement de la responsabilité personnelle de M. Bemba n'en est pas pour autant simplifiée. Sur ce point, on ne peut s'empêcher de constater l'imprécision du type de participation criminelle retenue par l'Accusation contre M. Bemba. Même en retenant le mode de participation le plus simple, c'est-à-dire celui du supérieur hiérarchique, ce qui aurait sans doute simplifié la tâche à l'accusation, on y constate aussi les mêmes imprécisions, et même des incohérences par rapport à une jurisprudence bien établie tant par la Cour internationale de justice, mais aussi par la Cour européenne des droits de l'homme, et même par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie.

crimes commis par ses troupes, et doit par conséquent assumer la responsabilité de ces crimes. Un tel mode de responsabilité serait fondé sur l'article 28 du statut de la C.P.I. Certains autres croient à tort aussi qu'il est poursuivi pour avoir

Un tel niveau élevé de responsabilité , celui de co-auteur (

Or l'accusation n'a pas été en mesure d'établir que l'Accusé savait ou en tout était censé savoir que ses troupes commettaient ou venaient de commettre ces crimes. Encore que ce niveau de preuve serait exigé uniquement pour établir la responsabilité en tant que supérieur hiérarchique et pas en tant que co-auteurs. Les seuls indices auquel a recouru l'accusation sont apparemment tirés des articles de la Presse, et spécialement la R.F.I. Pourtant une chose reste certaine, ce sont là des sources indirectes dont la partialité d'ailleurs n'est pas totalement garantie. Puisque la France était plus ou moins impliquée dans ledit conflit. D'autre part, il y a la confusion entre le fait de recevoir des rapports sur la situation générale des troupes, c'est-à-dire le nombre des blessés, les personnes tuées, les malades etc. et le fait des recevoir des rapports sur les exactions commises en territoire étranger. Cette distinction n'apparaît pas dans le dossier de l'accusation. C'est encore cette même confusion qui apparaît encore une fois concernant la question du contrôle des troupes sur le terrain des opérations militaires.

C.- La difficulté d'établir la responsabilité personnelle de M. Bemba, même en tant que commandant ou supérieur hiérarchique (art. 28 du Statut de la C.P.I.).

Qui avait le contrôle des troupes du M.L.C. en R.C.A. ? Ceci parait être la question centrale. Dès lors que les troupes du M.L.C. étaient envoyées en RCA, suivant l'invitation des autorités démocratiquement élus de la R.C.A., l'établissement de la responsabilité personnelle éventuelle de J.-P. Bemba sur ces troupes doit nécessairement répondre au schéma posé par l'article 8 du Projet d'article sur la responsabilité internationale des Etats tel que posé par la Commission du droit international (C.D.I.) dans son texte final adopté en 2001 par l'assemblée générale des Nations Unies (

ordonné la commission desdits crimes. Ce mode de responsabilité est déjà plus grave que le premier et est fondé sur l'article 25-3-b du statut. La vérité c'est qu'il est poursuivi sur la base d'un mode de responsabilité beaucoup plus grave que les deux premiers, celui d'être co-perpetrator ou co-auteur (art. 25-3-a). L'aggravation de sa situation n'est malheureusement pas étayée par les preuves disponibles. Ces preuves tel que cela découle des débats de confirmation des charges, ne permettent même pas de retenir le mode de responsabilité le plus faible, c'est-à-dire celui du supérieur hiérarchique qui aurait négligé de prendre les mesures pour prévenir ou punir les crimes commis par ses troupes. co-perpretor) nécessite non seulement un niveau de contrôle très élevé sur des troupes qui ont commis les crimes allégés, mais aussi quelque chose de plus que le fait de donner les ordres de commettre les crimes. Il s'agit en effet de commettre lesdits crimes par l'intermédiaire de quelqu'un d'autre. Ce mode de participation criminelle est très difficilement concevable pour les personnes qui se trouvaient très loin du lieu de la commission desdits crimes. Ann. C.D.I., 2001 vol. II(2), lequel article dispose que « le comportement d'une

personne ou d'un groupe de personnes est considéré comme un fait de l'Etat d'après le droit international si cette personne ou ce groupe de personne, en adoptant ce comportement,

On découvre ainsi, comme l'a soutenu l'un des avocats de M. Bemba que l'une des faiblesses de l'Accusation, c'est justement de déduire du contrôle que M. Bemba exerçait sur ses troupes en R.D.C., sur le territoire sous son contrôle, de déduire donc dece contrôle en R.D.C., le contrôle en R.C.A. Ce raisonnement apparaît trop simpliste, dès lors que ces troupes étaient envoyées en réponse à une demande émanant des autorités démocratiquement élus d'un Etat souverain. La simple logique commanderait de partir plutôt d'une présomption opposée c'est-à-dire de considérer que ce sont les autorités centrafricaines qui avaient le contrôle tant technique qu'opérationnelle des activités et opérations militaires en R.C.A. On ne comprendra pas la présomption consistant à partir de l'idée que M. Bemba a continué à donner des ordres sur le terrain des opérations militaires en territoire étranger, et que c'est maintenant lui qui doit démontrer qu'il n'avait pas le contrôle de ses troupes en R.C.A. La présomption doit plutôt lui être favorable de manière à ce que l'Accusation soit tenue de rechercher les preuves des instructions militaires que M. Bemba continuait à donner sur le champ de bataille. Encore que même dans cette hypothèse, on doit se garder de supposer que les instructions militaires étaient des instructions criminelles pour la simple raison que des crimes de guerre s'en sont suivis. Les instructions criminelles, c'est-à-dire celle qui consiste à demander à ses troupes de commettre des exactions contre les civils doivent être démontrées et non simplement déduites du résultat sur terrain.

La deuxième difficulté consiste à reprocher à M. Bemba de n'avoir rien fait pour punir les membres de se troupes lorsqu'il a eu vent que ses troupes auraient commis des excations à l'endroit des populations civiles centrafricaines, alors que M. Bemba avait écrit tant au Représentant de la Mission la mission des Nations Unies en R.C.A. (BONUCA) en date du 4 janvier 2003, qu'au Président de la F.I.D.H. en date du 20 février 2003, pour solliciter leur concours afin de diligenter une enquête et tirer au clair toutes les allégations sur la commission

agit en fait sur les directives ou sous le contrôle de cet Etat ». L'une des applications de ce critère est sans doute l'affaire Nicaragua, dans laquelle la C.I.J. a estimé que ce contrôle devait être « effectif » (C.I.J., Affaire c. Etats-Unis, Arrêt du 27 juin 1986, § 115), alors que la chambre d'appel du T.P.I.Y. dans l'affaire Tadic a estimé suffisant le critère du « contrôle global » pour attribuer à la R.F.Y. les actes commis par les Serbes de Bosnie et pour qualifier le conflit en Bosnie-Herzégovine (Prosecutor c. Tadic, Appeal Chamber, 15 July 1999, § 145). C'est encore sur ce critère du contrôle que la CI.J. est revenu dans l'Arrêt Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monté négro, du 26 février 2007, dans l'affaire R.D. Congo c. Ouganda, Arrêt 19 décembre 2005. La C.I.J. n'est d'ailleurs pas la seule juridiction à asseoir ce critère de contrôle. On pourra citer quelques arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, notamment dans l'affaire Bankovic c. Belgique, Arrêt du19 décembre 2001) mais beaucoup plus particulièrement dans l'affaire Behrami contre France et Saramati contre France, Allemagne et Norvège (Arrêt du 2 mai 2007, §§ 133-139). Nous approfondira l'analyse de ces jurisprudences plus tard lorsque la décision de la chambre préliminaire sera rendue. Retenons à ce stade que le critère du contrôle effectif est donc déterminant dans l'établissement de la responsabilité étatique et par extension celle de la responsabilité personnelle des autorités étatiques. C'est ce même critère qui apparait aussi déterminant dans l'établissement de la responsabilité personnelle des chefs rebelles lorsque des crimes sont imputés à leurs troupes.

desdits crimes, et voir comment punir ceux qui en seront coupables. Dès lors que ces deux lettres n'ont reçu aucune suite tant du coté des Nations Unies que du coté de la F.I.D.H., il devient très difficile de lui reprocher son abstention dans la répression desdits crimes commis en R.C.A.

V.- Conclusion

L'autorité et le prestige de la justice internationale reposent essentiellement sur la capacité d'établir un juste équilibre entre le respect du droit au procès équitable pour les suspects ou les accusés et les impératifs de la lutte contre l'impunité. L'affaire Bemba est finalement une illustration de ce dilemme. D'une part, en se mettant à la place des victimes de toutes ces atrocités commises en RCA, atrocités que la représentante des victimes relatait sans pudeur et dont le récit était susceptible de donner de la nausée, dans l'espoir sans doute de toucher la sensibilité des juges, il est clair que les auteurs de ces actes horribles et inhumains doivent rendre compte devant la justice internationale. Mais lorsqu'ils seront appelés à rendre compte, ils doivent bénéficier du respect du droit de la défense pour éviter qu'ils ne deviennent eux-mêmes des victimes expiatoire d'un système déséquilibré au profit des victimes directes des crimes de droit international. Or, dans cette affaire, il nous semble, à notre humble avis, que l'Accusation, touchéepar les cris des victimes (ce qui est tout à fait légitime) soit tombée dans le piège de chercher à trouver absolument, non pas le (s) vrai (s) coupable (s), mais plutôt une victime expiatoire. La question, au regard du déroulement de ces quatre audiencesde confirmation des charges, consiste à se demander si finalement l'épée de la « justice », après toutes ces quatre années d'instruction, ne serait-elle pas malheureusement tombée sur la « mauvaise » personne, celle de M. Bemba ? On objecterait sans doute en disant que quand bien même les charges contre les M. Bemba étaient confirmées, il serait toujours présumé innocent, car les juges n'auront pas statué sur sa culpabilité, ni sur son innocence. Mais cette présomption d'innocence n'est que théorique. Pourrappel, c'est depuis le 24 Mai 2008 qu'il est détenu, que ses biens, ceux de sa femme et même ceux de ses enfants ont déjà été saisis ; qu'il a été arrêté à Bruxelles, au moment où il se préparait à aller exercer ses activités politiques comme chef de file de l'opposition R.D.C. Peu importe le résultat final de cette procédure judiciaire, sa réputation aura été fortement entachée par ces mois de détention, que le triomphalisme des O.N.G. et des média, face à son arrestation et à sa détention, trahissent lefait que l'homme semble avoir déjà été condamné par le tribunal de l'opinion publique, celui des média et celui des O.N.G. Cet état des choses va sans doute se prolonger lorsque la chambre préliminaire, tout en ne confirmant pas les charges contre M. Bemba, était néanmoins amenée à céder à la demande du Procureur de maintenir le suspect en détention, pour permettre au Procureur de rassembler de nouvelles preuves. Dans cette circonstance d'ailleurs, il est plus facile pour le bureau du Procureur de tomber dans le piège de n'instruire qu'à charge et non à décharge comme cela est pourtant exigé. Si le dossier de l'Accusation n'est pas bien ficelé, à défaut de trouver un argument valable pour justifier sa détention par la C.P.I., on sera amené à conclure à un procès politique. La réponse de la chambre préliminaire de la C.P.I. sur cette affaire nous aidera sans doute à approfondir ces analyses.

Fait à La Haye, 20 janvier 2009

: M. Bemba, une victime expiatoire ?

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